Après un été trusté par trois blockbusters, le cinéma coréen revient, comme tout le monde, à la normale. Cette semaine sortent au moins quatre films coréens, formant un panel très représentatifs du cinéma local. Nous nous arrêterons sur le nouveau film de Kim Ki-duk 김기덕, Moebius et un documentaire engagé, Cheonan Ship Project.

Spy, pour les acteurs

spyMais d’abord, un gros film d’action, Spy, est peut être intéressant, parce qu’il est mené par deux des plus grands acteurs coréens, le vétéran Seol Kyeong-gu 설경구 (de Oasis à Haeundae) et la pétillante Moon Sori 문소리 (qui illuminait Une femme coréenne de Im Sang-soo). Ils sont épaulés par une ribambelle de seconds rôles connus, et un métis américain asiatique qui fait carrière ici, Daniel Henney. On ne présage pas des talents d’acteurs, il fait surtout le beau gosse de service, reste qu’il est un nouveau signe de l’ouverture du cinéma local à des visages non coréens. Attention quand même, le réalisateur avait pondu l’affreux film de motos balourd Quick, il y a quelques années. Ce devrait de toutes façons être mieux que Miss Change, comédie commerciale qui sort aussi cette semaine, dont le trailer soûle déjà.

Moebius, un nouveau Kim Ki-duk particulièrement trash

Face à ces grosses artilleries le nouveau film du réalisateur de Pieta (et Locataires, Printemps Eté, etc), Kim Ki-duk 김기덕, essaie de taper plus fort que tout le monde. Nous n’avons pas vu le film, mais ce qui est sûr est que Kim Ki-duk revient à ce qu’il fait normalement le mieux, les films sans dialogues, comme les trois cités plus haut. Donc en plus Moebius sera facile à comprendre pour n’importe lequel étranger, d’autant que comme d’habitude aussi, Kim Ki-duk semble avoir écrit le scénario sur un coin de table. Le film vient d’être présenté au festival de Venise, comme d’habitude aussi, et divise, encore.

Il est déjà décrit comme un huis clos dans une famille de gros barges, sorte d’orgie boucherie à tous les étages mélangeant, en gros, les idées les plus trash qui l’ont traversé dans ses films précédents, avec la confirmation de ses trips religieux. Donc facile à comprendre, seulement peut être difficile à supporter. Tout ne semble pas sanglant quand même, par exemple cette belle séquence :

Dans tous les cas Kim Ki-duk a le droit de s’amuser à charcuter qui il veut, tout auréolé du plus grand prix international jamais remporté par un réalisateur coréen (Lion d’Or à Venise), et en faisant presque tout lui même : il produit et monte tous ses films, et ici, comme souvent, il filme.

Cheonan Ship Project, sur un des grands scandales de l’époque Lee Myung-Back

cheonanRayon indépendants, les plus curieux pourront essayer de voir Cheonan Ship Project 천안함 프로젝트, surtout s’il est diffusé avec des sous-titres (checker à Cineplus Apgujeong par exemple). C’est un documentaire sur la fameuse affaire du bateau Cheonan, englouti avec tout son équipage, dans des circonstances pour le moins mystérieuses. Le gouvernement de l’époque avait accusé une torpille nord-coréenne, justification aussi crédible que le bon gag des armes nucléaires de Saddam Hussein. Le documentaire démontre sans mal que l’argument de la torpille ne tient pas, que le gouvernement a sciemment empêché les secours d’approcher le bateau pour empêcher des premières constatations vitales, comme une autopsie d’un corps, bonne que si elle peut se faire dans les premières heures. Que cachait le gouvernement ? Rien n’est sûr encore, et le documentaire ne peut trancher, la thèse qui tient la corde est celle d’un sous-marin américain qui aurait embroché le bateau par erreur.

Produit par le réalisateur très engagé Cheong Ji-yeong 정지영 (National Security), Cheonan Ship Project est marquant pour sa longue interview d’un marin à qui on ne raconte pas de bobards sur comment un bateau coule, à nous montrer comment se plie un bateau avec un bout de journal (photo). Il est également méritant avec ses reconstitutions 3D didactiques, cependant un peu trop scolaire, télévisuel dans son approche. Cela reste un must pour les amateurs de grands scandales politiques qui pullulent en Corée.