ORIGINE DES GISAENG

L’origine remonterait, selon les historiens, à la période tardive de Silla Unifié et au début de la dynastie Goryeo mais à vrai dire, ils n’en ont aucune preuve réelle. Selon eux, les premières filles de joie auraient été des femmes de la basse classe sociale de Silla et puis de Goryeo. La définition propre d’une Gisaeng à cette époque était une femme qui séduisait les hommes grâce à sa capacité artistique (danse, chant) et non pas sexuelle. Il va de soi que le but final était tout de même que les hommes de la classe Yangban profitent sexuellement de ces femmes.

Courtisane coréenne sous Joseon

STATUT SOCIAL ?

Les Gisaeng étaient protégées par un statut sous Goryeo mais elles étaient considérées comme des esclaves et devaient servir la haute classe sociale, sous peine de perdre leurs droits. Outre le chant et la danse, elles excellaient aussi dans le dessin et la poésie. Le fait de bénéficier d’une protection de la cour ne veut pas dire qu’elles l’étaient réellement car aux yeux des Yangban, elles étaient d’un statut social inférieur et donc devaient être traitées de la même façon que toutes les autres personnes de cette classe. Ce que je veux dire plus haut c’est que leur statut était celui d’esclave mais que celui-ci les protégeait des hommes non issus de la classe Yangban. Ceux de la classe Byeolgam qui abusaient des Gisaeng étaient emprisonnés ou exécutés. La plupart des Gisaeng ont malheureusement hérité de ce travail par leurs mères tandis que d’autres étaient vendues parce que leurs familles ne pouvaient plus subvenir à leurs besoins. Cependant, les Gisaeng pouvaient être libres seulement si quelqu’un pouvait payer le prix de leur liberté (un haut rang de Yangban).

GYOBANK: PREMIERE ACADEMIE DE FORMATION

Sous Goryeo, une académie fut fondée dans le seul et unique but de former des Gisaeng. Sous Joseon, leur statut était beaucoup mieux protégé et leurs performances de chants et de danses, mieux structurées. Cette académie était un vrai centre de formation tournant à plein régime dans lequel des centaines de jeunes femmes y étaient formées. L’académie la plus prestigieuse était localisée à Pyeongyang. Elles entraient à 8 ans, commençaient le travail à 16 ans et terminaient vers 22 ans. La première académie fut fermée sous le règne du roi Hyeonjong en 1010 mais fut rouverte plus tard sous le règne de Chungnyeol (1236-1308).

Gisaeng apprenant la musique

VIE QUOTIDIENNE SOUS GORYEO & JOSEON

Les courtisanes sous Goryeo et Joseon dépendaient d’un officier chargé de garder un registre avec les noms de celles-ci (pour éviter des évasions) ainsi que des preuves de prestations effectuées. Elles étaient inspectées 2 fois par mois et elles étaient obligées de continuer leurs éducations musicales et artistiques. La plupart d’entre elles pouvaient être au centre de plaintes formulées par les hommes et c’est dans cette optique, pour remédier à ce problème, qu’un ‘ mari ‘ (non-légal) était désigné. Il lui offrait la protection et le financement en échange de performances. Ces maris choisis étaient le plus souvent des militaires, des fonctionnaires du gouvernement ou de la cour royale. En aucun cas, elles ne faisaient l’objet d’une quelconque appartenance à ces hommes. Mes mots peuvent heurter les femmes qui lisent mon texte mais c’était cette réalité à ces époques. Ces femmes étaient la propriété de la cour et ces militaires ou fonctionnaires devaient respecter la loi imposée par le souverain. Malgré leur statut social les considérant comme des objets, les Gisaeng ont également joué un rôle de guide touristique en accompagnant les émissaires qui voyageaient partout dans la péninsule ainsi que des rôles de véritables assassins (Non Gae fut l’une des plus courageuses Gisaeng lors de la guerre de l’Imjin quand elle dansa en 1593 avec un général japonais sur une falaise et l’entraîna avec elle dans le précipice). Elles ont aussi permis, par exemple, aux taverniers et aubergistes, de s’enrichir grâce aux arrêts des convois étrangers dont elles faisaient partie; ce qui a maintenu une économie stable dans le pays. Il aura fallu attendre la réforme Gabo sous Gojong entre 1894 et 1896 pour abolir le système des classes et cette maltraitance à l’égard des femmes Gisaeng. Cependant, avec le peu de chance pour elle d’avoir un autre travail, elles continuèrent à proposer leurs services aux hommes.

Jeunes Gisaeng du 19è siècle sous Joseon (moins de 20 ans)

DE NOS JOURS

On n’en parle moins souvent mais la prostitution actuelle en Corée émane de l’intervention américaine en 1950 et de l’idée du dictateur Park Jeong Hee, de vouloir relancer l’économie de son pays par tous les moyens possibles. Il délégua en secret ces affaires illégales aux personnes locales formant la pègre d’après-guerre, en construisant des motels (de passe) et en organisant un système de tourisme sexuel, ils remplirent donc leurs objectifs. Ceci a eu pour but non seulement de relancer l’économie et de reconstruire le pays mais aussi d’attirer les étrangers et leurs investissements.

Dans les années 1980, plusieurs d’entre elles abandonnèrent cette profession et cette perte de chiffre d’affaires pour le gouvernement a obligé celui-ci à amener des prostituées étrangères en Corée. Il aura fallu attendre 2004 pour que le gouvernement Sud-coréen interdise la prostitution. Cependant, des descendantes directes des courtisanes sous Joseon travaillent encore à l’heure actuelle et servent d’objets sexuels pour le parti communiste nord-coréen. Ces groupes de femmes sont appelées ‘ Gippeumjo ‘. J’aimerais que vous puissiez vous rendre compte qu’en Corée du Nord, ces femmes sont endoctrinées et utilisées pour satisfaire le plaisir des hommes de la haute classe nord-coréenne (souvent des militaires). Ces femmes sont réparties en 3 groupes ayant chacun un rôle bien défini: le sexe, les massages et la danse dénudée accompagnée du chant (ce qu’on peut considérer de nos jours comme le strip-tease).

Je conclus en pensant qu’il est certain que ce que vous avez aperçu ou que vous apercevrez dans les séries dramas, ne reflète certainement pas ce que ces courtisanes ont vécu réellement. Je ne veux absolument pas comparer la douleur de ces femmes qui vécurent 500 ans avant celles aujourd’hui, car la douleur est très personnelle sur le fond mais aussi la même sur la forme. Ce que je veux vous expliquer c’est qu’il ne faut absolument pas vous fier à ces séries qui essaient de vous attendrir avec ces belles femmes bien habillées et ces amours entre une Gisaeng et un Yangban qui durent pour l’éternité. Tout cela est faux. Elles sont toujours mieux perçues au cinéma alors que leur réalité fut tout à fait antagoniste, c’est-à-dire, à l’extrême opposé que ce que le cinéma véhicule comme image.

Sources: Thomas Galant + Lee, Baeyong, Women in Korean history, Ewha Womans University Press, 2008, 320 p., ISBN 8973007726

Sources photos:
www.sinonet.org

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