mina

Une lecture Inside Corea : Mina d’ Apple Kim

Editeur : Decrescenzo

Traduit du coréen par Kim Hye-gyeong et Jean-claude de Crescenzo

Juin 2013

275 pages/13×20
Isbn 978-2-36727-009-8
Prix 20,5 €

Le quatrième de couverture

Mina, Minho et Sujeong, les trois lycéens de ce roman font partie de la nouvelle génération Gangnam Style.

Après le suicide de sa meilleure amie, la vie de Mina bascule. Dans sa chute, elle entraîne Sujeong, son autre amie. Freinée dans des ambitions qu’elle pense légitimes, cette dernière va se venger de la plus horrible des manières. Une vengeance à plonger le lecteur dans la stupeur.

Avec Mina, nous entrons dans le royaume de la jeunesse dorée de Séoul, une jeunesse surtout soucieuse de jouir sans entrave, qui n’a ni désillusion, ni scrupule, ni traumatisme. Impassible devant la souffrance des autres (ou des animaux) et certaine de son destin protégé, elle est fière d’appartenir à une élite abrutie par le maintien de son statut social.

À 29 ans, considérée comme une écrivaine irrévérencieuse, Kim Apple est la figure de proue des écrivains en révolte contre un système accusé de broyer une jeunesse insouciante jusqu’à l’inconscience, jouisseuse, violente et si peu préoccupée de l’intérêt public. Elle dénonce sans relâche une société mercantile et stressante, et des conflits intergénérationnels qui poussent chaque catégorie à en exclure une autre.

Lire les bonnes feuilles

(…)

« Bonjour Minho » Sujeong salue Minho. La joue laiteuse de Sujeong apparaît en forme de triangle rectangle par la fente de la porte entrouverte. « Bonjour Sujeong » Minho salue Sujeong. Sujeong bondit dans l’appartement. La porte d’entrée se referme derrière elle et le système de verrouillage chantonne ses trois syllabes.

Elle se dirige lentement vers le salon. Le ciel. Sujeong fixe le plafond avec attention. Le lustre. Il est allumé. Elle plisse les paupières, esquisse un sourire.

– Mina.

Mina est allongée au milieu du salon, les deux mains sagement posées à plat sur son ventre. Les yeux fermés, son visage rendrait heureux tous ceux qui la regarderaient. Par les haut-parleurs, la voix de Kim Gordon se répand. Je voulais changer ta façon de ressentir. Tout en se tortillant, Mina esquisse un sourire alangui. Son corps s’enroule mollement à la musique. Sujeong lève la tête et fixe les haut-parleurs. Des haut-parleurs effilés, au design contemporain. Elle s’assied sur Mina à califourchon, sans dire un mot. Mina a toujours les yeux fermés. Sujeong étrangle Mina. Minho éteint la lumière. Le visage de Mina s’empourpre. Le ciel s’assombrit. Dès que Sujeong met un peu plus de force dans la strangulation, la douleur fait plisser le front de Mina et sa bouche s’entrouvre. Minho rit encore. L’obscurité descend lentement et les trois jeunes gens sont quasiment invisibles. C’est une plaisanterie. Une plaisanterie. Une plaisanterie.

« Il y avait autrefois une princesse qui aimait les serpents. Elle importunait son père au point qu’il fit aménager un petit jardin dans un coin du palais, planta herbes et arbres et y ajouta de nombreux serpents. Parmi les congénères, la princesse se prit d’affection pour l’un d’eux et en prit un soin tel, qu’elle en vint à le traiter comme du cristal. Elle disait à tous qu’elle devrait mourir le jour même où ce serpent mourrait. Un jour, le serpent disparut. La princesse intima l’ordre aux servantes de le retrouver. Les servantes apportèrent l’un après l’autre les serpents du jardin, et à chaque fois que la princesse faisait non de la tête, les servantes les tuaient et les jetaient dans un trou profond. Les serpents disparurent peu à peu du jardin. Certains s’étaient enfuis tandis que d’autres ne descendaient plus de l’arbre le plus haut sur lequel ils s’étaient réfugiés. Munie d’un arc et de flèches, la princesse se mit à tuer les serpents fuyards. Malgré tout, elle ne retrouva pas son serpent préféré. Elle pleura à chaudes larmes et se demanda si elle devait se retirer ou mourir. Mais pour se tuer, elle aurait aimé être sûre que son serpent préféré fût mort, et pour se retirer elle se trouvait bien trop célèbre. Elle contracta une grippe. Si la maladie traîne en longueur, je vais sûrement mourir, pensa- t-elle. Le roi offrit alors à sa fille l’exacte réplique en cristal de son serpent favori. Bien que fort heureuse, elle jeta le présent par terre, et le brisa net. Elle prit un fragment du cristal brisé et l’enfonça dans son cœur, espérant mourir. Mais à ce moment- là, surgi de nulle part, un serpent s’enroula autour du corps de la princesse, lécha d’une langue déjà rouge le sang qui coulait. Le roi furieux voulut le tuer mais le serpent le mordit et le roi empoisonné finit par mourir. Le serpent s’enfuit bien loin. »

(…)

Notre avis : Le style d’Apple Kim dérange sans aucun doute… La violence psychologique et physique règnent en maître dans ce livre où la jeunesse d’aujourd’hui est décrite avec la plus grande des froideurs. Trois jeunes s’aiment, se cherchent, se séparent, se jalousent,  et ne forment au final qu’une entité du mal. C’est la société coréenne  et son système d’éducation surtout qui sont remis en cause. Apple Kim va loin, peut-être trop loin… Nous voulons croire qu’il y a toujours de l’espoir et que tout n’est pas si noir…

C’est avec plaisir que nous souhaiterions lire vos commentaires à propos de ce livre.

Site de l’éditeur : http://www.decrescenzo-editeurs.com/